Prenez une wyverne métamorphe souffrant d’une intolérance à la magie et un elfe royal libertin… et éloignez-vous le plus possible.
Brick est une wyverne métamorphe n’ayant ni la ruse ni les talents diplomatiques qui caractérisent ses comparses. Lui, il est grand et musclé, et plus lent que le reste de sa famille : celle au pouvoir. Pire encore, il n’est vraiment pas à l’aise quand il y a de la magie dans l’air, alors assister aux festivités du mariage royal sur le territoire des elfes, c’est un casse-tête. Vraiment.
Jagger est un elfe. Proche de la famille royale, il fait partie d’une lignée qui produit des chanceliers et des conseillers depuis des siècles. Cet héritage a toutefois dû sauter une génération, car Jagger est plus intéressé par la beuverie et les coucheries. Il a un avantage : tout le monde veut savoir si la réputation des elfes est justifiée. Spoiler alert : elle l’est.
Lorsque Brick découvre qu’il fait partie de l’offre qui scellera le traité d’alliance entre wyvernes et elfes, il est furieux et décide de couper les ponts avec sa famille pour faire sa vie. Mais il doit d’abord trouver comment sortir du royaume elfique. Lorsque l’idée lui vient de demander un guide à la taverne, on le mène à une chambre où il trouve Jagger à demi nu sur un lit à baldaquin.
C’est là que débute leur dangereuse et folle aventure sexy…
General Release Date: 21st July 2025
— Aïe !
Brick attrapa la main qui le giflait et lança un regard noir à la personne à qui elle appartenait. S’il n’avait pas su qui le frappait, les nombreuses bagues cocktail colorées et les bracelets tintants auraient trahi sa petite sœur, Scarlet.
— As-tu une bonne raison de me gifler ?
Scarlet pencha la tête de côté, et plissa le front.
— L’habitude ? Peu importe. Ne bouge pas…
Brick resta tranquille assez longtemps pour qu’elle lui enfonce des boules de coton dans les narines avant de repousser sa main. Les ongles acérés de Scarlet à proximité de n’importe quelle partie de son corps le rendaient nerveux en général, mais davantage encore dans le carrosse bruyant qui les transportait en les chahutant. Ses ongles étaient longs et pointus, et brillaient de la couleur acajou la plus vive qu’elle puisse trouver pour imiter les serres de son autre forme.
Normal, conclut Brick. En général, les wyvernes étaient fières de leur nature ; la famille au pouvoir d’autant plus, et en particulier sa petite sœur, la plus jeune du Trône de Rubis.
— Merci, marmonna-t-il, la voix obstruée, mais pas seulement par le coton qui bloquait le sang. Merci d’être restée avec moi.
Il savait qu’elle aurait préféré voler aux côtés du carrosse de leur père, Carnell le potentat du Trône de Rubis et de leur mère, la première dame, Cerise, ainsi que du fils et héritier, Lord Gules et de leur sœur aînée, Lady Vermillion. Mais c’était son tour de lui tenir compagnie et pour Scarlet, à l’instar de la famille, le devoir était une priorité.
— Tiens-toi droit, répondit-elle en agitant un doigt vers son visage pour lui indiquer comment mieux stopper le saignement.
Toute la famille le savait, car Brick saignait toujours du nez quand il était près d’une zone de magie, ils s’étaient donc préparés pour ce jour.
— Ouvre grand pour tes cachets.
Il ouvrit docilement la bouche et Scarlet se recula en ricanant dans le coin le plus éloigné du carrosse pour lancer deux comprimés d’affilée en les éjectant avec son majeur et son pouce comme pour marquer des points. Scarlet exécutait ses obligations familiales, certes… mais elle faisait en sorte de s’amuser aussi. Elle et Brick s’adoraient.
Il essaya de ne pas s’étouffer sur ces énormes cachets au goût horrible.
— Merci, répéta-t-il en souhaitant qu’elle ait pensé à lui donner à boire pour les avaler.
À la réflexion, non… il n’avait pas envie qu’elle lui asperge la bouche avec un pistolet à eau. Il vérifia que le coton était toujours en place dans chaque narine.
— Il doit y avoir beaucoup de magie ici.
— Euh, sans blague, rétorqua sa sœur. À l’intérieur du royaume elfique et si près de la capitale ? À quoi t’attendais-tu ? Ici, on respire la magie et on le pète aussi.
Oh, quelle élégance…
— Je dois t’apprêter… tu ne vas pas me mettre du sang dessus, hein ?
Il secoua la tête et la laissa arranger sa veste de costume comme un bébé, bien qu’elle soit la plus jeune des deux. Logique, vu que je suis empoté comme un bébé au sortir du nid. Elle fit claquer sa langue et lui brossa les épaules et les revers comme si les écailles de la tête de Brick étaient tombées en pellicules. Ce n’est pas le cas, j’espère ? Il ne lui manquerait plus que ça au moment où ils devaient tous se présenter sur leur trente-et-un pour cette occasion royale.
Dès que Scarlet se rassit en marmonnant qu’elle ne pouvait pas faire mieux avec ses cheveux courts, il jeta un coup d’œil rapide dans la vitre du carrosse pour vérifier s’il avait des pellicules. Il aperçut brièvement le reflet de sa peau couleur de bronze et de ses yeux dorés et fendus avant que le spectacle extérieur n’attire son attention. Non, pas le royaume bien entretenu qu’ils traversaient, avec ses rues pavées, ses bâtiments d’apparence solide et la propreté générale attestant d’une bonne gouvernance, mais sa famille, dans les airs, au-dessus de la petite procession.
Brick baissa la vitre pour mieux voir. Les quatre wyvernes royales représentaient une superbe volée de couleur vive qui battait des ailes avec une grâce synchronisée. Elles tournaient lentement la tête au bout de leurs longs cous élégants pour s’incliner d’un côté puis de l’autre, sous les cris et les applaudissements des habitants qui bordaient la route, exaltés de voir des nobles et dignitaires dans leur ville.
— Les elfes doivent avoir l’habitude des créatures volantes, non ?
Scarlet émit un petit rire moqueur.
— Pas comme nous.
— Peut-être pas.
Une femme trébucha en se protégeant les yeux des écailles étincelantes des wyvernes, les nuances de rouge arrangées avec soin, du cardinal de son père Carnell au grenat brillant de sa mère Cerise – « la première du royaume depuis des siècles ! » comme elle aimait à le rappeler.
Le rouge impérial fier de son frère Gules venait ensuite, puis le pourpre criard de sa sœur Vermillion. Chaque membre placé dans le bon ordre donnait l’impression de flammes qui embrasaient le ciel.
Brick ne savait pas pourquoi ils insistaient pour arriver comme s’ils mettaient le feu à leur destination. En revanche, il savait que Scarlet aurait voulu être à leurs côtés et faire son entrée telle une large coulée de lave contrastant sur le bleu et le blanc du ciel. Il sursauta lorsque la créature du quatuor d’un rouge vif comme un joyau plongea en piqué pour passer son bec par la fenêtre : sa mère venait voir comment il allait.
Elle ne pouvait pas parler sous cette forme, évidemment, mais il n’eut aucun mal à interpréter ses croassements et les gestes agités de sa tête. Elle s’inquiétait à son sujet, elle l’aimait. Tous l’aimaient. Comme ils aimeraient un petit lourdaud à peine sorti de son œuf. Il n’était pas malin ni rusé, il n’avait pas sa place à la table politique ou dans les négociations commerciales, alors ils lui donnaient de petites tâches pour l’occuper. De basses besognes. Il hocha la tête pour montrer à Cerise qu’il allait bien et lui tapota la tête, près du sommet, à l’extrémité de la crête frontale.
D’un cliquetis du bec, elle s’envola pour rejoindre Carnell, tournant en cercle autour de lui d’un battement lent des ailes avant de se placer à ses côtés. Il agita la queue pour la glisser le long de la sienne.
— Oh, beurk !
Sur le siège en face de lui, Scarlet montra du doigt le potentat et la première dame et eut un haut-le-cœur tel un feulin essayant de rendre une boule de poils. Elle chercha exagérément l’un des sacs qu’ils conservaient pour Brick en cas de nausée – on ne pouvait jamais prévoir les effets de son intolérance à la magie.
— Les préliminaires de vieux, c’est dégoûtant.
Brick ne trouvait pas le geste si repoussant. Il ne souhaitait jamais voir ses parents s’embrasser comme des subadultes ou des juvéniles, où que ce soit, mais qu’ils se montrent toujours tendres et affectueux était… quelque chose qu’il ne s’imaginait jamais connaître. Les seuls qui avaient voulu de lui jusqu’à présent étaient des personnes qui l’avait utilisé pour se rapprocher du Trône de Rubis.
— Maman, regarde !
Sur le trottoir près d’une taverne, une petite fille aux yeux émerveillés tirait sur le bras de sa mère. Là-haut… des dragons !
— Des wyvernes ! s’écria Scarlet en s’élançant si loin par la fenêtre pour corriger l’enfant que Brick, inquiet pour sa sécurité, l’agrippa par le dos de sa robe.
— Regarde l’image, gamine ! ajouta-t-elle en tapant les armoiries sur le côté de la voiture royale, une silhouette simple d’une créature en forme presque complète de « S » avec les ailes écartées et de longues pattes bien visibles.
— Compte les pattes, petite, continua-t-elle, il y en a deux, pas quatre. Est-ce qu’on ressemble à ces bœufs d’exploitation que sont les dragons, à ton avis ?
Elle vint se rasseoir sur son siège et jeta un regard furieux à Brick.
— Rien contre toi, frangin.
— Je sais.
Brick était grand et imposant, bâti comme une armoire à glace, comme on disait, alors que les wyvernes, outre leur finesse, étaient légères et agiles. Des serpents ailés, en fait. Il avait eu beau essayer de nier qu’il décevait le Trône de Rubis…
— Tu n’es même pas rouge !
C’est ce que lui avait reproché Olahf en mettant un terme à leur relation lorsqu’il s’était rendu compte qu’être avec Brick ne le propulserait pas dans le sérail du gouvernement.
— Ton nom évoque ta couleur de brique !
Après tout, Olahf était loin d’avoir l’éloquence innée d’un sénateur ou d’un diplomate, bien qu’il sache user de sa langue à d’autres égards… Il frissonna à ce souvenir, puis la tristesse l’envahit.
Cette relation avait-elle été fausse ? Olahf l’avait-il aimé ? Dans le cas contraire, leur liaison avait été, eh bien, transactionnelle dans le meilleur des cas et dégradante sinon. Il avait aussi réfléchi à ses expériences avec les autres wyvernes métamorphes qui s’étaient liées d’amitié avec lui au fil des ans… et qui n’avaient pas semblé très amicales. Combien de ces hommes, s’ils ne s’étaient pas servis de lui, l’avaient simplement supporté pour pouvoir tirer quelque chose de la relation ?
La vie aurait-elle été différente si mon nom était Flamme ou… ou Rosso ? Peut-être qu’en portant le premier, il aurait été élégant et un tout petit peu dangereux. Avec le deuxième, un séducteur sombre bien moins fréquentable ?
— Persimmon est un nom intéressant, songea-t-il à haute voix. Sim serait un surnom sympa. Salut Sim, tu viens prendre une petite chope d’hydromel ? Ou Simmy peut-être ? Simmy, tu te joins à nous pour patrouiller à l’aube ? Perse ? Percy ?
— Quoi ? Non… tu sais quoi ? Je ne veux pas savoir. Scarlet secoua la main. D’ailleurs, on est presque arrivés.
Sur le point de lui demander comment elle savait qu’ils arrivaient à l’endroit où ils se plieraient à des exercices diplomatiques pour le commerce et les aides en dégustant des breuvages, Brick aperçut l’oiseau messager cérémoniel qui venait rejoindre les quatre wyvernes dans le ciel. Cette escorte ravirait sa mère, elle qui tenait tant aux apparences. Même son père avait fait remarquer plus d’une fois que les elfes avaient coutume de s’en tenir aux convenances et qu’il espérait que le roi des Tempêtes respectait les traditions.
— Bien entendu, tant que Jerrick est son conseiller, répondait toujours Cerise. Jerrick servait également le père de Jade. Et son père, Jacron, était le chancelier de l’empereur des Tempêtes avant cela. Et le fils de Jerrick… elle s’arrêtait là, en général.
— À plus tard !